juin 14, 2014 at 11:23
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Très malin, la récupération du tube de Roy Orbison qui fournit à « Pretty woman » son titre et sa musique de générique ! Et pas bête du tout, le choix de Julia Roberts pour interpréter Vivian, une professionnelle du macadam de LA : avec ses mini-jupes et ses cuissardes, elle fait des ravages sur Hollywood Boulevard. Pas assez, cependant, pour payer son loyer ce soir-là, il lui manque 300 dollars. Par chance, elle croise la route d’Edward Lewis, un repreneur d’entreprises, style Bernard Tapie. Quiproquo l’homme d’affaires prend l’arpenteuse pour une call-girl de luxe. La suite n’est pas très difficile à deviner pourvu qu’on ait déjà aperçu deux ou trois comédies hollywoodiennes classiques, avec Cary Grant ou Judy Holliday. Mais tout l’art de Garry Marshall (qui pourrait être l’héritier spirituel de George Cukor) est d’en retenir le meilleur (voir les silhouettes «secondaires » comme celle du directeur de l’hôtel) et de transcender le lieu commun en le mettant au goût du jour langage d’aujourd’hui, rythme vif. Il sait enfin (et surtout) profiter de l’extraordinaire sympathie que dégage Julia Roberts — devant elle, Richard Gere, très fair-play, s’efface. On n’oubliera pas le morceau de bravoure de sa visite dans les magasins chic de Beverly Hills. Une étoile est née, quoi !
Le libertinage façon XVIlle siècle, avec ses jeux, ses défis, son cynisme brillant, c’était naguère un thème favori de la Nouvelle Vague, entre Doniol-Valcroze et Rohmer, voire Vadim. Christian Vincent, trente-cinq ans, l’adopte pour son premier long métrage. Fabrice Luchini y incarne Antoine, un écrivain paresseux dont le mentor, libraire et éditeur (Maurice Garrel), lui propose un projet original pour se venger de l’amie qui vient de le quitter, et de toutes les femmes, Antoine doit séduire puis abandonner une conquête choisie au hasard. Et, naturellement, tout consigner dans un journal de bord. Pour être Antoine, Luchini n’a qu’à peaufiner son propre personnage de bavard impénitent, lunaire, poète, parfois horripilant, mais cocasse pour lui, c’est un festival ! Quant à la « discrète», ainsi baptisée du nom de la mouche que les belles portaient au menton, c’est une révélation Judith Henry. Voici un film français qui tranche sur le tout-venant, qui touche par son charme autant que par son humour, et qui ne craint pas d’aller à contre-courant des modes. Résultat : le Prix de la critique à Venise et le Grand prix Martini à Paris. Une perle, comme on dit.
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